Lors de son animation annuelle pour célébrer la Ste Cécile, l'équipe de la Chopinière m'a proposé d'exposer sur le thème de "Comme en 14.".

Je déposerais mes "gueules cassées" réalisées cette année en hommage à mon père les 22 et 23 novembre à La Chopinière à Sainte Cécile. 

Mon ami Marcel Hosinger a fait un texte

 

"A propos des Guetteurs

Ils sont là, effilés contre le ciel. Guetteurs anxieux, ils n'ont plus de voix, ils disent l'attente.

Le manteau de l'écorce les a quittés. Ils sont là, nus et acides, avec toute la solidité de leur regard qui capture le ciel. Gerbe d'espoir, leur fragilité n'est qu'apparente . Leur élan a des racines sûres. Ils sont comme surgis d'une volonté unique et leurs différences, au delà des frémissements de la matière, ne s'exercent que dans les modulations subtiles de la couleur.

Du haut de leur calme détermination et de leur silence obstiné ils nous parlent de la condition humaine."

15 novembre 2014 M.H. 






Leurs années de jeunesse

(enchevêtrement d'ossements de "Poilus")

Dans un volume pyramidal comme pour mieux signifier l'écroulement, la chute mortelle de corps des soldats de 14-18.

Dans un espace cerné par des fusils, des baïonnettes, des fûts de canons... ! et, une délimitation de l'espace par un fil rouge sang.

Avec des corps crispés dans la mort, des crânes qui interrogent, des restes de la combustion, des morceaux de vêtement, des casques, des prénoms.

D. Cousseau, Novembre 2014.

A propos des Gueules Cassées

 

Les corps ont disparus, rendus à l'extrême fragilité de la tige de métal.

Les corps ont disparus. Il ne reste que l'insoutenable des visages qui nous interrogent. Visages lavés des couleurs de la vie, comme vidés de leur substance. A la place, un gris cendre, pareil à la boue tenace qui mange les hommes. Boue des Eparges, boue du Chemin des Dames, boue du Mort Homme le bien nommé...boue de Craonne. Toute une poétique des lieux pour mieux dire l'horreur .

Elles sont là, comme une interminable plainte, les gueules cassées de Dominique Cousseau.

Elles sont là, exactes au rendez-vous avec leurs casques Adrian intacts, propres, nets, bleus horizon et leurs insignes "République Française" bien visibles ; révélant par leur belle apparence leur incapacité à protéger quoique ce soit, renforçant même dans leur esthétique sournoise toute l’absurdité du drame (des beaux messieurs ont ergoté, pour quelques profits, sur leur épaisseur, gagnant quelques millimètres au dépens de quelques vies).

Elles sont là, les gueules cassées, comme un grand témoignage du passé, plantées sur leurs piquets, couronnées de leurs casques ; bloc épais de racines auquel rien ne peut plus arriver. On pense dès lors aux grands cimetières militaires, aux "Croix de bois" de Dorgelès. On pense aux hommes. Mais pour eux à quoi leur servirait une croix. Ils n'ont plus de bras pour s'y appuyer. Ici, c'est un peu comme si tout le bois de la croix était remonté au visage pour y incarner la souffrance.

Elles sont là et nous interrogent les gueules cassées de Dominique Cousseau, seules dans leur effroyable esthétique, pareil à des béances d'éternité...

"

Marcel HOSINGER, 7 novembre 2014..